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Transfert & Modification: tout accepter?

Dernière mise à jour : 22 mars 2018

Cass. Soc 1er juin 2016 n°14-21.143


Transfert du contrat de travail en application de l’article L. 1224-1 du Code du travail :

  • droit du salarié de s’opposer à toute modification (notamment le lieu de travail), autre que la modification de l’employeur

  • le nouvel employeur peut alors, soit formuler de nouvelles propositions, soit tirer les conséquences de ce refus en engageant une procédure de licenciement

  • le licenciement sera fondé sur une cause réelle et sérieuse


En conclusion:

  • le refus du salarié de voir modifié un élément de son contrat du fait du transfert de celui-ci justifie donc un licenciement

  • le contrôle judiciaire porte uniquement sur l’existence du refus et le lien entre la modification et le transfert


« Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 12 juin 2014), que Mme X..., a été engagée à compter du 15 novembre 2005 en qualité de secrétaire comptable par la société Mousset santé services, devenue Sud santé services et exerçait ses fonctions au siège de la société à La Seyne-sur-Mer (Var) ; que par lettre du 15 octobre 2011, la société Sud santé services a informé l'intéressée que du fait de son affectation exclusive à l'activité de gestion des tiers payant et de la cession avec effet au 1er novembre 2011 de cette branche d'activité à la société Tiers payant assistance (TPA) ayant son siège à Lyon, son contrat de travail était transféré en application des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail à cette société et que ses fonctions seraient exercées à Lyon ; que refusant le changement de son lieu de travail du fait de l'éloignement géographique, la salariée a été licenciée par la société TPA par lettre du 25 novembre 2011 ;


Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :


1°/ que l'application des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail est subordonnée au transfert d'une entité économique autonome, laquelle se définit comme un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre ; qu'en l'espèce, pour dire que le contrat de travail de l'exposante avait été transféré à la société TPA en application de ce texte, la cour d'appel s'est déterminée par la circonstance que la gestion des tiers payant pour les officines de pharmacie constituait une branche d'activité autonome à laquelle Mme X... était exclusivement affectée depuis 2008 ; qu'en statuant ainsi, sans indiquer en quoi l'activité de gestion des tiers payant était exercée par un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif propre, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard du texte susvisé ;


2°/ qu'en retenant que la gestion des tiers payant pour les officines de pharmacie constituait une branche d'activité autonome à laquelle Mme X... était exclusivement affectée depuis 2008, pour en déduire que le contrat de travail de l'exposante avait été transféré à la société TPA en application de l'article L. 1224-1 du Code du travail, sans répondre au chef péremptoire des conclusions d'appel de la salariée, développé oralement à l'audience, qui faisait valoir qu'à l'instar des autres membres du personnel, l'exposante travaillait indifféremment sur les tâches de tiers payant, de comptabilité, de secrétariat et de gestion des stocks de toutes les pharmacies dont la société Sud santé services avait la charge, tandis que parmi ces salariés, seule l'exposante s'était vue signifier le transfert de son contrat de travail, ce qui caractérisait une mesure discriminatoire et incompatible avec la règle d'ordre public du texte susvisé, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;


3°/ que lorsque l'application de l'article L. 1224-1 du code du travail entraîne une modification du contrat de travail autre que le changement d'employeur, le salarié est en droit de s'y opposer ; que, si, en cet état, le cessionnaire a la faculté de tirer les conséquences de ce refus en engageant une procédure de licenciement, ledit refus ne peut, à lui seul, constituer un motif de rupture du contrat de travail ; qu'en l'espèce, il est constant qu'à la suite de la cession d'une partie des activités de la société Sud santé services à la société TPA et au refus de la salariée de travailler pour le compte de cette dernière, Mme X... a fait l'objet d'un licenciement motivé par « son refus de changement de (ses) conditions de travail » ; que, dès lors, en décidant que le licenciement est justifié par une cause réelle et sérieuse, tout en relevant que le transfert du contrat de travail de la salariée entraînait la modification d'un élément essentiel de ses conditions d'exécution et, partant, était subordonné à l'accord préalable de Mme X..., ce dont il résulte que le refus exprimé par l'intéressée ne pouvait constituer un motif de licenciement, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et violé le texte susvisé, ensemble l'article L. 1221-1 du Code du travail ;


4°/ qu'en estimant que le refus opposé par la salariée à la modification de son contrat de travail était « d'ordre personnel », pour en déduire que son licenciement est justifié par une cause réelle et sérieuse, tout en relevant que ce motif était légitime, ce dont il résulte que le motif tiré d'un tel refus ne pouvait justifier la rupture du contrat de travail, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article L. 1224-1 du code du travail, ensemble l'article L. 1221-1 du même code ;


Mais attendu que, lorsque l'application de l'article L. 1224-1 du code du travail entraîne une modification du contrat de travail autre que le changement d'employeur, le salarié est en droit de s'y opposer ; qu'il appartient alors au cessionnaire, s'il n'est pas en mesure de maintenir les conditions antérieures, soit de formuler de nouvelles propositions, soit de tirer les conséquences de ce refus en engageant une procédure de licenciement ; que la cour d'appel qui a constaté que le transfert partiel à la société TPA sise à Lyon de l'entité économique à laquelle était rattachée la salariée avait entraîné par lui-même une modification de son contrat de travail, en a exactement déduit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé »

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